Jean Kittel

Artiste, Graveur, Corrosioniste, Artisan, Imprimeur

'"Oxidum es, et in oxidum revertis" 

Le métal dans tous ses états.

 Chercheur dans le domaine des matériaux et de la corrosion depuis plus de 25 ans, ma pratique artistique n’a commencé qu'à l'aube des années 2020, après une dizaine d’années de maturation. Les notions du temps qui passe, l’importance de ne pas céder aux désirs immédiats, mais de laisser murir les choses, étaient présentes dans ma démarche artistique avant même qu’elle ne se matérialise. L’approche scientifique, fruit de ma formation initiale, constitue un autre pilier de mon travail. Quoi de mieux que la corrosion des métaux pour illustrer la fragilité des créations de l’homme devant les forces de la nature et les lents effets du temps qui passe. L’âge du cuivre, puis ceux du bronze et du fer ont marqué des tournants historiques dans l’histoire de l’Homme, mais malgré tous les efforts et l’énergie nécessaires pour façonner ces matériaux, leur destin est de retourner à leur forme originelle : « Oxidum es, et in oxidum revertis ».

Fléau pour l’industrie, l'esthétique tragique de la corrosion se matérialise dès qu’on la traduit en mots : corrosion bactérienne, filiforme, feuilletante... Si le chercheur vise à en maîtriser les effets, l’aléatoire prend souvent le dessus. Pour le graveur, elle est une alliée puissante. L’artiste cherche à rendre beau ce qui fait peur, à mettre en lumière ce qu’on ne voudrait pas voir. Enfin, l’artisan aide à matérialiser ces traces sur le papier pour en fixer l'empreinte.


Fortement influencé par Pierre Soulages ou Hans Hartung, la technique d’impression d’estampes à la manière des eaux-fortes m’est apparue comme une évidence pour figer à un instant l’état du métal rouillé. L’encrage en taille douce redonne une existence à la matière qui a irrémédiablement disparu. La taille d’épargne souligne les zones qui n’ont pas encore subi les affronts du temps. L’utilisation comme pigments d’oxydes ou de carbonates métalliques perpétue ce lien entre la matrice métallique vieillie et sa reproduction sur papier, qui forment alors deux œuvres distinctes qui se répondent et se complètent. Devant les jeux de textures et de couleurs ocres, le spectateur peut deviner les souffrances du métal. Il peut aussi laisser libre cours à un imaginaire plus abstrait de paysages lunaires ou martiens ou de nuits étoilées. 

 Researcher in the field of materials and corrosion for over 25 years, my artistic practice only began at the dawn of the 2020s, after a decade of maturation. Notions of the passing time, the importance of not giving in to immediate desires, but allowing things to mature, were present in my artistic approach even before it materialized. As a fruit of my academic background, the scientific approach is another pillar of my work. What better way to illustrate the fragility of man's creations facing natural forces and the slow effects of the passing time than through the corrosion of metals ? The ages of copper, bronze and iron, marked historic turning points in the history of mankind, but despite all the effort and energy required to shape these materials, their destiny is to return to their original form: "Oxidum es, et in oxidum revertis".


A scourge for the industry, the tragic aesthetics of corrosion materialize as soon as we put it into words: bacterial corrosion, filliform, environmentally assisted cracking... If researchers aim to control the effects, randomness often takes over. For the engraver, it is a powerful ally. The artist seeks to make beautiful that which is frightening, to bring to light that which we would not wish to see. Finally, the craftsman helps to materialize these traces on paper to fix their imprint.


Strongly influenced by Pierre Soulages and Hans Hartung, the technique of printing etchings appeared to me as an obvious way of freezing the state of rusty metal for a moment. Intaglio inking gives new life to material that has irretrievably disappeared. The use of metal oxides or carbonates as pigments perpetuates the link between the aged metal matrix and its reproduction on paper, creating two distinct works that respond to and complement each other. The play of textures and ochre colors allows the viewer to guess at the suffering of the metal. They can also give free rein to a more abstract imagination of lunar or Martian landscapes or starry nights.